C’est à une soirée rencontre DES MOTS, DES PAS & DES CURIOSITÉS d’Éric Poindron, soirées littéraires dont j’aime les charmes et la générosité, que j’ai fait la connaissance de l’auteur et très réputée animatrice d’atelier Virginie Lou-Nony. Une auteure qui parle du silence de l’écriture, pas du bruit qu’elle fait ou ne fait pas dans les médias. Elle étonne par sa présence calme, sa facilité à raconter son parcours, sa passion pour l’acte d’écrire et sa capacité à saisir le silence d’où viennent les mots. Elle se raconte le plus simplement du monde et écoute en même temps, même le chat, qui pourtant passe entre les fauteuils d’un pas feutré. Virginie Lou-Nony, qui n’aimait pas l’école, est devenue professeur de lettres ; et comme, elle ne voulait pas enseigner le français comme on le lui avait enseigné, elle a eu l’idée de faire des ateliers d’écriture, puis au début des années 80, elle a fondé l’Aleph, création qui fait d’elle en France, avec François Bon, une pionnière des ateliers d’écriture.
La soirée avance, Éric Poindron présente deux autres invités, deux auteurs qui participent aux nouveaux ateliers Gallimard.
Le concept d’ateliers d’écriture en France est sujet à polémique. Peut-on apprendre à écrire ?se demande-t-on dans les soirées littéraires ou sur les réseaux sociaux. Si personne ce soir ne s’oppose à la pratique d’un atelier d’écriture, les points de vue sont divergents sur la conception de l’atelier. Un fossé se creuse, énorme. Pourtant, j’ai l’impression que chacun parle bien de la même chose, mais pas sous le même angle. Un peu comme si l’une décrivait le côté pile et l’autre le côté face d’une même pièce. Habituée des ateliers d’écriture que j’ai pratiqué aux États-Unis, en tant que participante, mais aussi animatrice, je sais que les techniques d’écriture s’apprennent. Aux États-Unis (depuis les années 50), l’écriture s’enseigne au même titre que la peinture, la sculpture, la danse, le cinéma ou la musique. Tous les étudiants en art du pays ne deviendront pas des artistes, mais sans doute feront-ils des carrières dans la publicité, le graphisme… De même pour les étudiants dans les programmes d’écriture. Aucune polémique pour moi donc. L’atelier d’écriture est une bonne pratique que l’on veuille devenir écrivain ou pas, que l’on se pense déjà écrivain ou pas. Et chaque atelier possède en lui sa propre finalité suivant l’intitulé, mais aussi en fonction de l’attente et désir de ses participants.
Virginie Lou-Nony a en plus de la pratique de l’écriture en atelier, une pratique d’ouverture à l’écriture pour tous : Les ateliers d’écriture sont un des rares lieux fondés sur le don et le partage, dons et partages qui nous enrichissent et nous arrachent au passage à l’abjecte logique économique, ce qui n’est pas une mince satisfaction » écrit-elle dans la préface de son livre Ce qui ne peut se dire.
Chez Acte Sud
Au fil de la soirée, elle me parle d’un projet pour aller encore plus loin dans cette quête : offrir un lieu à celle ou celui qui veut se retirer des vicissitudes du monde matériel quelque temps pour écrire.
Le projet, c’est La maison de l’écriture :
» Créer un lieu où cette activité non productive, dont la seule finalité est de donner du sens à l’existence humaine, puisse s’abriter, s’épanouir et prospérer, voilà l’utopie de la petite communauté, née des ateliers d’écriture que Virginie Lou-Nony anime depuis trente ans, et rassemblée dans l’association l’Ermitage. »
Un lieu rêvé par tous ceux qui ont écrit ou ont envie d’écrire. Virginie Lou-Nony, au travers d’une association L’hermitage, composée d’anciens participants de ses ateliers, vient de léguer un bâtiment et un terrain afin de rénover la première maison de La maison de l’écriture. Pour remettre en état, la bâtisse, l’association fait appel à une participation avec contrepartie (crowdfunding sur Ulule). Les participations commencent à 5,00 euros.
Toi qui en as rêvé comme moi si souvent pendant si longtemps, et même si tu n’en as plus besoin aujourd’hui, d’autres comme toi en rêve et en ont besoin maintenant. Donne 5 euros, 10 euros, 15 euros, 20 euros… Contribue à un projet qui a pour but d’offrir un endroit pour écrire à celle ou celui qui en éprouve l’urgence et n’en a pas les moyens matériels. La maison de l’écriture est ouverte à toutes et à tous. Elle te sera toujours ouverte.
J’ai contribué au projet La Maison d’écriture, parce qu’il vient se placer dans un acte de générosité, il vient répondre à un désir, à un besoin humain, parce qu’il me permet de contribuer à faire un monde meilleur avec cette petite maison dans laquelle des femmes et des hommes continueront de venir y écrire longtemps après que nous y soyons passés.
J’irai un jour à La maison de l’écriture !
Une vidéo pour en savoir plus sur la nécéssité d’une Maison de l’écriture :
Sur mon billet précédent, je vous annonçais la série über interactive AllSinnersSerie de Jeff Balek, projet de « Fiction transmédia et collaborative » en temps réel sur le réseau social Twitter.
Je me suis inscrite pour participer au projet en mon nom, je pensais y participer en tant que l’auteur Chris Simon, mais je ne sais pas comment ç’est arrivé, au deuxième jour deux personnages me sont apparus : un très jeune enfant accompagné de sa gouvernante américaine. C’est donc ensemble que nous avons traversé la tempête s’abattant sur Yumington entre le 28 novembre et le 2 décembre 2012. Je retrace dans ce billet mon experience et publie le texte qui en a résulté (dans lequel j’ai inséré mes intéractions avec d’autres Twitt’actrices/acteurs du projet).
En chiffres ma participation c’est : 80 tweets (dont la majorité sur le dernier jour), 4 intéractions, 3 retweets.
En terme d’expérience : je constate que j’ai mis du temps à démarrer, 1 tweet par jour dans les deux premiers jours, je n’ai pas lu toutes les consignes dès le début sur le site de AllSinnersSerie, ce qui fait que je n’ai pas eu toutes les informations en main dès le départ. Exemple : l’existence du Bar pour rencontrer les autres twitt’actrices et acteurs. J’ai navigué et me suis emparée de l’univers de Jeff Balek à l’intuition et chaotiquement, mais le contexte même du scénario n’était-il pas un chaos !?
Qu’est-ce que ça m’a apporté : j’écris rarement au kilomètre si je puis dire. Je réfléchis beaucoup avant d’écrire et mets sur le papier peu de phrases, ce qui explique mon lent démarrage sur AllSinners. Sur les derniers jours, j’ai écrit au kilomètre, je veux dire sans réfléchir pousser par chaque phrase. C’est un exercice que je pratique rarement. J’ai ressenti une impression de grande liberté et de spontanéité (mais n’allez pas en déduire qu’il n’y a aucune spontanéité dans mes écrits !) J’ai aussi établi une ponctuation adaptée au format twitter (140 signes maximum) afin de gagner des espaces (chaque tweet devant contenir : #AllsinnersSerie #TwitterFiction) et je publie le texte avec cette ponctuation qui me semble lisible. Et j’ai aussi rencontré de nouvelles têtes sur Twitter et ça c’est cool ! 😉
Qu’est-ce que j’aimerais voir améliorer : l’interaction avec les autres twitt’actrices/acteurs de manière à faire se rencontrer nos personnages dans les décors de Yumington, même tenter d’agir sur leurs trajectoires indivituelles. Il m’a paru difficile dans le projet tel quel de le faire. J’ai tenté de retweeter certains récits que je voyais passer, m’en inspirer parfois dans mon propre récit, interagir avec d’autres twitt’acteurs… Je dis bien j’ai tenté !
Bilan : Positif. J’ai trouvé cette forme d’écriture très addictive et proche de la performance. Le dernier jour j’ai fait deux fois 1h30 de suite de récit tweeté. Je me suis prise au jeu. J’ai apprécié l’urgence (5 jours), la necessité de répondre en intègrant les news de Yumington et surtout me retrouver dans l’univers d’un autre auteur. Je crois que le fait que tout se déroule en temps réel a été libérateur pour moi. C’est une autre forme d’écriture, il faut fournir, faire appelle à son imagination, écrire tout ce qui nous vient à l’esprit. C’est une technique d’écriture plus scénaristique que romanesque. Je ne rendrais certainement pas public un premier jet de scénario, mais ce texte dont je ne suis pas sûre de la légimité de le publier dans son entier puisque les tweets du récit n’ont pas été conçus pour une forme de permanence, je le montre ici et j’assume le récit abracadabrant de cette écriture effrenée ! Une deuxième forme de libération !
Série transmedia et collaborative ent temps réel
Jour 1 : 28 novembre 2012
Horreur ? L’écrivain n’aimait pas ce mot Il lui fit horreur et il l’effaça
Jour 2 : 29 novembre 2012
Elle ne sait pas quoi faire de ce colis daté de 1897 C’est lourd, encombrant, comme sa tête Aspiriiiiine!
Jour 3 : 30 novembre 2012
Episode 1
Impossible d’appeler YouPS De rendre le colis La route inondée ressemblait au Mekong Ouvrir Ne pas ouvrir
Elle appela son fils Espérait qu’il ne contenait rien de périssable Un enfant irresponsable devant la loi
-Je sais que ce n’est pas Noël Noël en novembre ! -Il est trop gros -Ouvre, c’est pour toi -J’en veux pas
-C’est pas pour toi Ouvre ! Il lui sourit et tira sur la ficelle qui céda vu son grand âge
Il tomba sur les fesses La boîte se désagrégea, nauséabonde Elle recula protégeant l’enfant -Ferme les yeux !
La Bouche : projet littéraire que j’ai lancé en juin dernier. J’avais envie de rencontrer des auteurs et des lecteurs, mais surtout j’avais envie de les rencontrer autrement.
De même que je dédie un espace sur ce blog aux auteurs auto-publiés, de même j’ai envie ici de prendre un peu de temps et d’espace pour remercier tous les internautes curieux qui suivent La bouche depuis six semaines.
La bouche au moment où j’écris ce billet a atteint les 7024 visites. C’est énorme, et je ne pensais pas qu’autant de lecteurs nous suivraient dans cette exploration littéraire. C’est une des plus belles surprises de cet automne. Merci pour ce cadeau !
C’était un pari étrange. Tenter de lancer un cadavre exquis avec des contraintes et une consigne donnée ; et guider à chaque texte un auteur à la manière d’un territoire guidant un cours d’eau.
La Bouche, collectif et exploration littéraire
Point de départ : Une auteure arrive dans une ville qu’elle ne connait pas et se rend dans une maison d’édition pour récupérer un manuscrit qu’elle a envoyé, mais voilà le manuscrit rendu n’est pas complet, il manque la couverture… Lire La Bouche 1
Les mots avant d’avoir du sens sont des sons. Notre bouche, aidée d’autres organes, les produit. Comment à partir de ces sons, l’homme en est arrivé aux mots, puis aux phrases et à la littérature ? C’est-à- dire à pousser le langage, dont l’utilisation première semble être née d’une nécessité : communiquer pour trouver son chemin, demander à boire, à manger, à une autre fonction beaucoup plus inutile, mais peut-être tout aussi fondamentale.
La littérature possède-t-elle un organe privilégié comme le chant ? La littérature, définie souvent par référence aux auteurs passés ou présents : Shakespeare, Proust, Céline, Virginia Woolf, Toni Morrison selon les goûts des uns et des autres. La littérature inaccessible ou abordable selon les cultures. La littérature sacrée et immuable.
Pour la première fois, la littérature sort du domaine du papier, comme des siècles plus tôt le langage était sorti des bouches, et entre dans le domaine des mathématiques, du code. Si « l’écriture c’est faire passer de l’invisible au visible. » comme le rappelle Clarisse Herrenschmidt, comment cette alchimie se produit sur nos écrans ?
La bouche, projet balbutiant, n’est pas une tentative de réponse, mais une tentative d’exploration du phénomène numérique, dans lequel chaque auteur utilise son expérience, son imagination et ses compétences. Un projet dans lequel je voulais tester l’écriture, nos capacités à la faire évoluer, auteurs et lecteurs d’aujourd’hui, auteurs et lecteurs d’un jour ou d’une vie, tous témoins de ce passage des mots vers le code.
Que devient la narration ? La synchronicité et la synchronisation du récit ? Le temps et l’espace ?
Participez ! N’hésitez pas à commenter l’expérience, à partager votre lecture de la bouche, c’est une expérience collective qui souhaite mettre le lecteur au coeur de l’expérience.
Il nous faut ensemble, auteurs et lecteurs réinventer une littérature capable de donner un nouveau sens à ce monde et ne pas uniquement se contenter (même s’il ne faut pas s’en priver) de reproduire ou lire ce que nous savons qui marche et a marché.
Je remercie tous les lecteurs, les auteurs qui ont participé au projet et le site de La Cause Littéraire, qui sur un concept de quelques lignes, a embrassé l’aventure.
“Sévèrement” encouragée par votre intérêt et votre assiduité, je souhaite, bien sûr, renouveler l’expérience pour votre plaisir, celui des auteurs et le mien.
Witold Gombrowicz w Vence. (Photo credit: Wikipedia)
Hier, déjeunant sous le porche, nous parlions avec une amie de Witold Gombrowicz. Alors que je pensais à ces succès numériques qui font cette année la Une des blogs, m’est revenu en mémoire un entretien filmé de Gombrowicz dans lequel il confiait :
Moi, je ne peux pas avoir de grandes prétentions parce que je suis un écrivain pour un public limité…
Et concluait par :
Il y a un art pour lequel on est payé et un autre pour lequel on paie. On paie avec sa santé, ses commodités et caetera et caetera
Samedi, il fait très chaud, l’humidité est à 88% sur Majors Path Road et toute la côte. Des restes de sardines grillées répandent dans la voiture leurs effluves d’ammoniac. Fenêtres ouvertes et climate à fond, nous filons à la décharge municipale avant de nous rendre à Son Jardin sur North Sea Mecox Road.
Une propriété arborée descendant jusqu’à l’étang Little Fresh Pond, trois serres d’une vingtaine de mètres de long, des fleurs jaillissant de partout, nous saluant élégantes et espiègles, des plantes et des légumes alignés pieds sortant des bâches noires, deux musiciens et un chanteur, des voisins et des gens du coin qui la connaissent depuis toujours.
Fleurette Guilloz aura 95 ans en octobre. Elle est assise détendue, jambes allongées, pieds posés sur une caisse, jambes tendues, casquette fuchsia sur la tête pour combattre la chaleur étouffante, chaleureusement entourée de sa nièce, Deborah Guilloz et de l’aide qui prend soin d’elle chaque jour.
Sur une longue table, des crackers, du fromage, des minis sandwiches d’une autre époque, fins et délicats comme des After Eight, du thé glacé et de la citronnade faite avec de vrais citrons.
Fleurs d’août
Deux enfants dansent devant les musiciens et tout autour de nous, des fleurs pleines d’une joie étrange : bégonias, Rudbeckia hirta, hibiscus rouge et blanc, marguerites, phlox, Buddleja davidii lilas ou arbres aux papillons, agérates, zinnias, cosmos, hortensias et hortensias paniculatas blancs, un jardin miniature de cactus et même un palmier, et encore d’autres fleurs dont je ne connais pas les noms :
Son jardin
Jardin des cactus
L’histoire commence à Nantes en 1881. Henri Martin, responsable en chef maritime pour la Compagnie Générale Trans-Atlantique doit de l’argent à son beau-frère, Monseigneur Joseph. Celui-ci le menace d’enfermer ses filles au couvent s’il ne lui rembourse pas ses dettes. Henri, qui ne peut pas payer mais veut sauver ses filles, a une idée : les envoyer en Amérique chez une de ses clientes d’Atlanta dans l’état de Géorgie qui souhaite apprendre le français et la cuisine française.
Marie et Camille, qui a une passion pour les fleurs, embarquent sur un paquebot Trans-Atlantique vers le nouveau monde. Après quelques années au service de cette américaine, les soeurs se marient. Camille épouse un commis-voyageur français qui l’emmènera à Baltimore et lui donnera un fils avant de disparaître. Pour survivre et élever son fils, Camille, qui a appris la couture de sa belle-mère, crée des robes pour la société bourgeoise de Baltimore et engrange suffisamment d’argent pour se rendre à New-York, ville de toutes les possibilités en ce début de 20e siècle.
Camille devient modiste et vit avec son fils dans un foyer pour immigrés sur la 14e rue. Elle y rencontre un français, Charles Guilloz. Il a étudié l’horticulture, a fait son service (trois ans à l’époque) en Indochine avant d’immigrer aux États-Unis où il pense réussir dans l’horticulture. Très vite il travaille pour une famille d’investisseurs en bourse qui lui confie leur nouvelle propriété dans une petite ville en bord de mer à 80 miles de la métropole : Southampton. Ils lui commandent un jardin à la française. Avec l’avènement du train, Southampton attirent les nouvelles fortunes de New-York qui y bâtissent des résidences balnéaires.
Camille Martin et Charles Guilloz se marient et déménagent avec le petit Henry à Southampton. Les propriétaires leur allouent un des bâtiments attenant à la propriété. Ils ont un premier enfant : Charles Junior.
Son Jardin
Depuis leur arrivée à Southampton Camille rêve d’acheter un terrain, un petit bout d’Amérique comme elle dit. Elle convainc son mari. En 1908, ils achètent deux hectares de terrain pour 153,00 dollars. Ils y construisent une maison. C’est la maison devant laquelle je me trouve aujourd’hui, écoutant cet orchestre qui célèbre le jardin de Fleurette Guilloz, assise devant la maison où elle est née en 1917. Fleurette ressemblait à une fleur à sa naissance, ainsi son père l’appela tout simplement petite fleur.
La maison derrière le palmier
C’est une maison de bois très simple, au revêtement de shingles peints, sans étage, avec trois cheminées dont une très large en brique qui laisse deviner un four à pain. De 1908 à aujourd’hui, cette famille d’origine française a fourni légumes et fleurs à toute une communauté. Nous sommes tous venus aujourd’hui pour célébrer ce siècle de générosité et de créativité. Toute la ville a été invitée via le journal local : The Southampton Press.
La maison finie, Camille et Charles Guilloz dédicacent une parcelle de leur terrain au jardinage. Ils cultivent légumes, bien sûr, mais aussi des fleurs, la passion de Camille. Pour nourrir la famille, ils élèvent aussi quelques animaux.
Fleurette nous regarde défiler dans Son jardin, admirer les pastèques, les courges, les choux, s’extasier devant les fleurs comme si nous étions une partie de son oeuvre et de l’oeuvre de sa mère et nous le sommes, car sans ce jardin magnifique sans le travail de Camille (morte en 1958) et Fleurette nous ne serions pas ici aujourd’hui. Nous sommes aujourd’hui une partie du jardin, nous avons tous, à un moment de notre vie, acheter un de leurs bouquets ou leurs légumes. Je me souviens être venue ici pour la première fois, il y a une dizaine d’années et je me souviens avoir été émerveillée par le lieu. Fleurette jardinait encore. Elle a jardiné jusqu’à l’âge de 87 ans.
Son Jardin aux légumes
Durant des années, Camille et Charles y plantent toute sorte de variétés d’arbres, de fleurs de légumes, importent et créent de nouvelles espèces et font la compétition. À celui qui aura le plus beau jardin ! Camille appelle sa parcelle Mon jardin et celle de son mari Son Jardin, nom qu’elle gardera en sa mémoire après la mort de celui-ci en 1926. Son jardin devient le nom de propriété et le business de fleurs qu’elle développe pour nourrir sa famille durant les dures années qui suivirent : la grande dépression, la deuxième guerre mondiale…
Le jardin devient la seule source de vie. Camille creuse, sarcle, bine, plante, sème avec sa fille. Cela lui permet de surpasser et conquérir l’adversité, le chagrin et offre nourriture et beauté à toute une communauté. Aux riches comme aux pauvres, les fleurs sont vendues ou offertes. La visite est gratuite, elle l’est encore aujourd’hui. Son jardin est ouvert à qui sait regarder, apprécier, admirer. Des papillons orange et noirs virevoltent au-dessus des arbres aux papillons. Le kilo de tomates ici est toujours à 1,00 dollar.
Bananier et arbre aux papillons
Pour Camille et Fleurette, Son jardin aura été à la fois espace du passé et espace du futur. Leur dévouement et leur passion pour le jardinage leur ont donné la force de transcender leur vie. De transformer la terre d’exil en pays de cocagne.
Dans un livre intitulé Trans-Atlantique, Gombrowicz, exilé lui-même, pose la question du choix qu’engendre l’exil. L’exil vous laisse dans cet étrange espace ou seul avec votre héritage culturel vous devez choisir de vivre autrement.
Voici ce qu’il en dit lui-même :
Que choisir ? La fidélité au passé… ou la liberté de se créer à volonté ? L’enfermer dans sa forme atavique… ou ouvrir la cage, le faire s’envoler et qu’il fasse ce qu’il voudra ! Qu’il se crée lui-même !
Nous achetons quelques légumes, remercions les proches, Fleurette fatiguée s’est déjà retirée. Il est temps de quitter Son Jardin. Je ne peux oublier ce que je viens de recevoir. Un siècle de créativité.
À la mort de sa mère, Fleurette découvrit un journal dans lequel celle-ci écrivait en
français et anglais selon les jours, en voici une seule phrase qui sera mon mot de fin :
To know how to live is the greatest art.
North Sea Mecox RoadGOINGmobo, the magazine of the Mobile Bohemian
À force de surfer, googoliser, bookmarker, butiner d’une lecture l’autre, d’un réseau l’autre en français, j’ai repéré un nombre de mots et d’expressions bizarres que je me suis amusée à déchiffrer, répertorier et classifier. Un nouveau vocabulaire, de nouvelles expressions se mettent en place sans que personne ne semble s’étonner.
Qu’est-ce qu’un clavier cannibale ? Un bouquinovore ? Un poème sale ? Un digiborigène ? Un analogos ?
Les claviers cliquettent en continu… Créateurs d’éditions numériques, de sites, twitteuses et twitteurs, blogueuses et blogueurs inventent un nouveau vocabulaire pour habiter un nouvel espace et vivre un monde nouveau.
Le Bouquinovore
Les maisons d’éditions numériques contrairement à celles papier qui avaient une forte tendance à s’appeler par le nom de leur créateur : Gallimard, P.O.L, Flammarion… affichent des noms variés : Emue, Numeriklivres, ONLIT, publie.net, EdiCool…
Adjectif pour les éditions Emue, mais sans accent sur le premier E ce qui me fait penser à emu (prononcé imou) nom anglais d’émeu, un animal australien.
Pronom + verbe pour ONLIT (On lit) qui flirte avec l’anglais, car on peut penser à on (sur) et Lit abréviation de Literature en anglais, mais aussi participe passé du verbe to light (allumer).
Collage de mots pour Numeriklivres (numérique et livre) avec un changement d’orthographe sur le premier mot pour faire plus court.
Verbe conjugué pour publie.net tourné en adresse web ; et presque mot-valise pour EdiCool (mot édition tronqué auquel s’ajoute l’adjectif entier cool)
Les sites eux, affichent des locutions: Reflets du temps, La Cause littéraire ou encore le Tiers livre qui joue sur une expression préexistante : Tiers monde. Monde a été remplacé par livre, causant ainsi une familiarité et une référence cachée, pourtant évidente dans l’esprit de l’internaute.
Certains blogs pratiquent aussi la référence cachée :
auxbordsdesmondes d’Isabelle Pariente B. occupe avec « des mondes » nombreuses autres possibilités : des larmes, du lit, de l’eau… Dans le même esprit le blog : Au-delà du lac
Comme on fait son terrier, l’auteur Gilles Piazo a remplacé terrier par lit, cependant la locution en cache une autre, un proverbe : « Comme on fait son lit, on se couche » qui fait écho dans la tête du l’internaute lisant : Comme on fait son terrier. Il y a donc ici deux niveaux de référence cachée.
Le Digiborigène Nookeff va plus loin assumant que le lecteur connaît bien la question de référence et appelle son blog, Keff que tu racontes ?, remplaçant « qu’est-ce » par son prénom Keff.
D’autres introduisent le langage sms dans le titre de leur blog ainsi le blog QuandLM pour Quand elle aime et le portail pédagogique en multimédia IdMuse pour idée Muse.
Le site Culturewok va chercher côté cuisine et anglicisme pour parler littérature dans son bookwok. Le wok représentant l’ustensile de cuisine dans lequel tout se cuit laissant entendre que tout se lit chez Bookwok.
On trouve aussi des associations de mots inattendues, incongrues : Le clavier cannibale, blog de Madman Claro, poème sale blog de poésie ouvert et expérimental, face-écran de Daniel Bourrion. Deux de ces associations traduisent l’installation durable de la technologie dans notre quotidien.
Du latin même avec curiosa & caetera de l’auteur et éditeur Éric Poindron
Et pour finir mes préférés :
Les mots-valises, the portmanteau-words cher à Lewis Carroll ou du moins qui s’en rapprochent dans la démarche et la forme.
Ceci n’est pas un mot
Mot-valise ? Qu’est-ce que c’est ?
Ce sont des mots composés par télescopage qui regroupent la tête d’un mot et la queue d’un autre. L’amalgame se fait sur la base d’une homophonie partielle.
Exemple : calfeutrer, altération de calfater et feutre (à noter que ce mot-valise est entré dans le dictionnaire depuis longtemps)
You see it’s like a portmanteau—there are two meanings packed up into one word.’ …
Lewis Carroll
Les mots- valises ou approchant que j’ai glanés :
Numéritérature : altération de numérique et littérature, avec homophonie sur la voyelle i. Un t de littérature a sauté.
ActuaLitté : altération d’actualité et de littéraire, ici on garde exceptionnellement les deux têtes des mots avec une longue homophonie sur Litté. On admet la faute d’orthographe sur le mot actualité pour signifier que le site parle bien de l’actualité de la littérature !
Numéritératue 3.0 Magazine
Le bouquinovore : bouquin + vore. Pas parfait comme mot-valise mais joli mot, on retrouve bouquin en entier et vore, altération d’un mot comme carnivore ? Omnivore ?
Bouquineo (blog de la librairie du même nom) : bouquin + néo, pas parfait non plus comme mot-valise mais l’attache se fait sur une lettre commune le n.
Et le blog S.I. Lex au nom le plus mystérieux de tous au delà du premier sens visible est resté une énigme. Pourquoi ces lettres séparées par des points, ces majuscules et ces minuscules ? Quels mots représentent-ils ? J’ai envoyé un courriel à son auteur, Calimaq et voici ce qu’il a répondu :
S. I. Lex veut dire S=Sciences, I=Informations et Lex=droit. . Cela renvoyait à mon projet initial d’écrire Au croisement des sciences de l’information et du droit, ainsi qu’à mon statut particulier, car je suis à la fois (et autant l’un que l’autre juriste et bibliothécaire).
Mes recherches se sont limitées au domaine que je fréquente le plus, littérature et numérique.
Vous avez vous aussi peut-être accompli votre exploration lexicale et glaner mots-valises, associations, juxtaposition de mots, jeux de mots, expressions et locutions aux références cachées, implicites, etc,etc,etc. N’hésitez pas à les partager, échanger et compléter ma liste.
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Chris Simon _ Licence Creative Commons BY-NC
1ère mise en ligne et dernière modification le 28 juin 2012.
HABITER LA VITESSE DU TRAIN (1ère publication en français)
C’est à travers la revue Belge Diptyque, dans laquelle une de mes nouvelles venait d’être publiée, que j’ai rencontré pour la première fois François Bon. J’étais tombée sur un de ses commentaires sur la revue via Facebook. Comme le commentaire m’avait plu, j’ai cliqué sur son nom et l’ai demandé comme ami. C’était il y a deux ans, son profil Facebook comptabilisait 4235 amis. J’en avais seulement 98. À ma grande surprise, il a accepté.
Ainsi, à partir de juin 2010, j’ai commencé à suivre son activité sur Facebook et fréquenter ses sites : tiersLivres et publie net. François Bon est un pionnier en France du livre numérique avec un catalogue de plus de 300 e-books (plus de 600 en 2012).
En avril 2011, j’ai découvert qu’il organisait un atelier d’écriture singulier, un voyage en RER intitulé, La Traversée Littéraire à bord du RER C. Je lui ai demandé si je pouvais y participer et comment. Il m’a répondu aussitôt qu’il me suffisait d’envoyer une demande par courriel à une adresse SNCF. Deux jours plus tard je recevais une invitation à imprimer.
Invitation pour La traversée Littéraire
Samedi 2 avril 2011. Je me présente à 9h15 au Croque-Mie de la gare RER François Mitterand-Bibliothèque. Mathilde Laurent, la charmante responsable de la ligne C, me tend un carnet de moleskine, un stylo marqué des quatre lettres SNCF, un laisser-passer gratuit bon pour un aller-retour Versailles-Chantier et pour finir un mini pain aux raisins.
Grignotant mon pain aux raisins, je m’avance au comptoir du Croque-Mie et je commande un café. Oh, surprise, il est offert ! Toute cette générosité me met de bonne humeur malgré l’heure matinale.
J’observe mes compagnons de voyage tout en gobelotant mon café. Il y a plus de femmes que d’hommes. Des professeurs, des animateurs d’ateliers d’écriture, des écrivains pour la plupart.
C’est la première fois que je me retrouve dans cette gare. Trois femmes, des professeurs, habituées des ateliers d’écriture d’après leur conversation, saluent François Bon comme un vieux compagnon de route. François Bon est petit, plutôt rond, un visage lunaire qui s’illumine souvent d’un sourire gracieux et généreux sous des cheveux blancs dont les boucles semblent partir dans des directions opposées. Sa voix est douce comme celle d’un pédagogue. Son attitude montre une certaine bonté ; il porte bien son nom.
Un pigeon atterrit près de nous. Il lui manque trois doigts à la patte gauche. Je lui lance ma dernière bouchée de pain aux raisins. Il se jette dessus en boitant et la dévore. Je me décide à en demander un second et l’égrène pour le pigeon. Ne connaissant personne et ne me sentant ni l’énergie ni l’envie de me présenter aux autres (je ne suis pas du matin), je nourris le pigeon handicapé, observe mon entourage et enregistre sons, odeurs, mouvements et bribes de conversations.
Trois minis pains aux raisins plus tard, François Bon nous demande de former un cercle autour de lui et nous révèle les tenants et les aboutissants de cet atelier singulier.
Il nous présente le directeur de la ligne RER C, Pierre Cunéo, l’homme en jean est à l’origine du projet. Il a sollicité François Bon ainsi que Didier Michel de l’association S-Cube (plateau de Saclay) pour créer un projet d’écriture sur sa ligne. François Bon enchaîne, nous donne quelques clés : observer le monde par les fenêtres du 1er étage du premier wagon du RER C, qui a pour départ la station François-Mitterrand et pour terminus la gare Versailles-Chantiee. Inspiré par Espèces d’Espaces de Georges Perrec publié en 1973, François suggère les mots : habiter, emménager, l’Inhabitable, Écrire, ou une structure de phrase telle : que + Infinitif ou encore tenter de dresser une liste sur le thème de la ville aussi simplement que si on établissait une liste de courses.
RER C workshop in pictures/ l’atelier en images : click
C’est le départ ! Nous passons les tourniquets, montons sur la plateforme de la ligne C. Certains participants prennent des photos, d’autres gazouillent (twittent) ou facebouquent (facebookent) l’événement de leur smartphone. Je reste les mains dans les poches, concentrée et marche en tête du train. Ça me fait tout drôle de voyager en groupe. La dernière fois que ça m’est arrivée, j’avais 13 ans. J’allais en camp de marche, faire à pied la route des vignes en Alsace.
RER C workshop in pictures/ l’atelier en images Click
Le train entre en gare et nous montons tous au deuxième étage de la rame. Je m’assois sur le premier siège libre que je vois à ma droite, dans le sens de la marche. Je trouve l’assise raide et inconfortable. Comme la plupart des Parisiens, je ne prends jamais le RER sauf pour aller à l’aéroport. Une des participantes, la cinquantaine, s’assoie en face de moi. Toutes deux nous nous regardons, stylo et calepin en mains, prêtes. Il règne une atmosphère dissipée de départ en colonie de vacances- ceux qui n’ont pas encore trouvé un siège, ceux qui bavardent excités ou anxieux, les photographes vont et viennent dans l’allée cherchant un angle de vue sur l’intérieur ou l’extérieur ou un truc à prendre au vol… Le train démarre. Un à un, les regards se tournent sur le paysage qui doucement devient mobile.
Je regarde dehors, mais mon regard s’arrête sur la vitre, je contemple un moment le reflet de la main de ma voisine posée sur son calepin… J’écris : miroir de l’écriture
Le train maintenant traverse la périphérie industrielle, no man’s land de graffitis qui s’étend de la sortie de la gare au commencement de la banlieue.
Vitry-sur-Seine
attendre
attendre qu’une image se forme
attendre qu’un être humain surgisse
Un homme sorti de nulle part tend un micro et me demande ce que je viens d’écrire. J’énonce dans le micro les deux dernières phrases et me replonge aussi vite dans le paysage qui défile.
François Bon passe dans le couloir et s’exclame : « Vous pouvez travailler sur un détail comme les fenêtres. Est-ce que quelqu’un veut travailler sur les fenêtres ? »
François Bon, click
J’y songe, mais les fenêtres me semblent trop petites, vues de mon siège, et pas assez nombreuses. L’urbanisation du sud de la banlieue parisienne consiste en maisons individuelles et jardins privés plutôt qu’en cages à lapins empilées les unes sur les autres.
Nous passons la gare de Choisy-le-Roi et une décision s’impose à moi : suivre la vitesse du train. Pas de place pour l’écrit propret, l’arrangement des mots. Ce n’est pas un concours de fleuristes ou d’amateurs de nénuphars, mais un voyage pour attraper quelque chose, vue du train qui soit vrai. Une ambiance, un état, une vision qui ne peuvent être captés que de là où je me trouve, à la fois assise et en mouvement. Cette révélation me plonge dans une autre dimension.
butterfly trees bordent les rails
autour de pavillons les petits jardins fleurissent
À partir de la station Villeneuve-le-Roi, Habiter devient mon leitmotiv et je me vois engloutie dans un état émotionnel qui se révèle sur la page comme si la vitesse du train devenait la vitesse de mes artères, de ma pensée. Je ne suis plus dans le train, mais avec le train. Carcasses de camion, bureaux vides, grues, Matériaux de construction, ciment, haies sauvages, une femme, deux hommes, un enfant de deux ans et un Labrador retiennent mon attention.
Il m’apparaît soudain que ce vaste espace fragmenté, qui défile, est un endroit à vivre, à faire ses courses, à se coucher, à dormir, à se réveiller. La dimension humaine du lieu me rive à ma page. La nécessité pour l’être humain de trouver un toit, un lieu de vie est un incontournable de sa condition d’être humain.
Habiter
faire sa cabane
planter un clou dans le mur
accrocher son manteau
flotter avec les canards du lac
personne aux balcons, des barres de fenêtres, aux parkings complets
Habiter
planter sa parabole
être avec le monde chez soi
Le leitmotiv habiter s’impose un choix d’une évidence troublante. J’habite à Paris depuis deux ans et quatre déménagements. Je comprends soudain que le thème de cet atelier d’écriture est pour moi, non pas, un thème, mais une réalité. Je le vis depuis mon arrivée. Je viens tout juste d’emménager dans un nouvel appartement dans lequel je ne me sens pas encore tout à fait chez moi. Déjà un peu là, mais pas encore tout à fait ici.
Habiter
Construire, élever, faire des fondations, terrasser, planifier, urbaniser, architecturer, structurer, tracer, organiser, implanter, habitacle, conception, ergonomie
Ne pas oublier la nature
Ne pas oublier la nature humaine
terrain de tennis
J’écris et me sens en phase dans ce RER, oubliant complètement les autres participants, attrapant, ici et là, bribes et fragments dans le paysage toujours changeant.
Quand le train entre dans sa gare terminus : Versailles-Chantier, ma main s’arrête sur mon dernier mot : arrêter. Je ressens une grande joie et une immense fatigue. Je ferme mon cahier et descends du train le coeur léger.
RER C, Versailles-Chantier click
Sur le quai, la gare se découpe sur un ciel bleu vif, le soleil matinal nous chauffe les omoplates et brille sur nos vêtements, des oiseaux chantent, et chacun de nous se sent un peu plus pionnier, un peu plus écrivain qu’avant le départ. J’engage la conversation avec un homme d’une vingtaine d’année, auteur timide et qui manque encore d’assurance. François vient à notre rencontre, nous interroge. Nous nous présentons. Je lui dis que je suis nouvelliste et scénariste. Il me demande si j’ai un blog. Je réponds que non, je n’en ai pas.
Le train repart en direction de Paris. Chacun est remonté dans le wagon détendu et plus dissipé qu’à l’aller. Certains participants lisent ce qu’ils ont écrit. Vient mon tour et ça démarre mal ! Je lis deux phrases et réalise pour la première fois que si je peux écrire sans lunettes, je ne peux plus me relire sans. Complètement intimidée devant le wagon plein et dans l’incapacité de déchiffrer mes pages, je balbutie et panique. François s’empare de mon cahier et lit mon texte. Sauvée ! Je suis là, à côté de mes mots, je découvre mon texte en même temps que les autres participants, c’est un choc électrique. Je prends conscience de mon voyage.
François Bon reading/lisant
Habiter
son corps
son âme
occuper l’espace entre les pensées
arriver
trouver
être chez soi enfin
découvrir
tous les possibles
recommencer
un amas de caisses de bois et de cartons dans une benne
des camions et des générateurs
des draps qui sèchent
arriver, poser son bagage
faire son lit
sous le pommier fleuri en face de la gare Versailles-Chantier
pour repartir
un jour
jamais
peut-être
arriver
Ce retour vers Paris, à échanger nos textes, à découvrir ce que les autres ont vu du train, avec quels mots et quelles images ils l’ont exprimé, m’a ouvert de nouvelles voix, de nouvelles façons d’appréhender et d’expérimenter l’écriture. Je suis repartie de cet atelier avec une telle énergie que quelques jours plus tard, j’ouvrai un blog sur lequel je publiais ce compte rendu. Blog qui six mois plus tard a évolué sur WordPress.